Précisions sur l’application dans le temps de nouvelles règles en matière de détachement de travailleurs
Le Conseil d’État s’est récemment prononcé sur l’obligation de déclaration préalable au détachement de travailleurs en France, et plus particulièrement sur son application dans le temps (CE 24 février 2021, req. n° 431090).
En l’espèce une société portugaise demandait l’annulation d’amendes infligées par l’Inspection du travail pour manquement à l’obligation de déclaration préalable au détachement précisée par le décret du 30 mars 2015 qui est entré en vigueur le 1er mai 2015. Le détachement ayant eu lieu à partir du 4 mai 2015 mais le contrat de prestation de services ayant été conclu antérieurement à l’entrée en vigueur du décret, la société soutenait qu’elle avait respecté ses obligations car elle avait adressé les informations exigées par la réglementation antérieure le 19 mars 2015 et car la date du début du détachement initialement prévue était le 23 mars 2015.
Le Conseil d’État a répondu que l’obligation de déclaration préalable au détachement est attachée non pas au contrat de prestation de services mais au détachement des salariés. De ce fait, les employeurs doivent satisfaire à cette obligation pour tout détachement effectif réalisé à compter du 1er mai 2015. Ni le fait que le contrat de prestation de services ait été conclu antérieurement à l’entrée en vigueur du décret, ni le fait que la date du détachement était initialement prévue avant le 1er mai 2015, ni le fait qu’une déclaration conforme à l’ancienne règlementation avait été transmise ne justifie le respect de la nouvelle obligation de déclaration préalable. Ceci s’explique par la volonté de protéger les travailleurs détachés et de lutter contre la fraude.
Selon le même raisonnement, le Conseil d’État a précisé que l’obligation de désignation d’un représentant de l’entreprise en France est également applicable pour tout détachement effectif réalisé à compter du 1er mai 2015.
Il est important de garder à l’esprit que tout manquement à ces obligations expose à une sanction administrative en cas de contrôle de l’Inspection du travail. Nous attirons votre attention sur le fait que, depuis l’entrée en vigueur le 30 juillet 2020 de l’ordonnance n°2019-116 du 20 février 2019 transposant en droit français la directive (UE) 2018/957 du 28 juin 2018 (cf. notre Newsletter « Les nouvelles dispositions applicables au détachement de travailleurs en France »), l’administration peut interdire une prestation de services internationale lorsque l’employeur n’a pas payé une amende administrative prononcée pour manquement à une obligation en matière de détachement.
Au vu de cette jurisprudence qui nous semble transposable à l’ordonnance n°2019-116, il est important de respecter les nouvelles obligations issues de celle-ci pour tout détachement effectif réalisé à compter du 30 juillet 2020.