La compétence juridictionnelle en matière de reconnaissance de jugements étrangers
Dans une décision rendue le 21 mars 2024 la Cour de Justice de l’Union Européenne se prononce sur une double question qui a pour objet l’articulation entre le règlement (UE) n. 1215/2012 « Bruxelles I bis » et la Convention de Genève de 1956 relative au contrat de transport international de marchandises par route (CMR) en matière de clause d’élection de for.
En particulier, la cour est saisie de la question de savoir si les juridictions chargées de reconnaître une décision rendue par une juridiction d’un autre État membre peuvent d’une part vérifier la compétence de cette dernière, et d’autre part refuser la reconnaissance de ladite décision dans le cas où la compétence de la juridiction serait établie en violation d’une clause d’élection du for (selon les règles issues de la convention internationale CMR).
A la première question la Cour répond par la négative sur la base d’une lecture combinée des articles 31 de la convention CMR et 71 du règlement Bruxelles I bis. La première disposition prévoit que l’exécution d’un jugement est soumise à l’accomplissement des formalités prévues à cet effet dans le pays intéressé et renvoi donc à l’article 71 du règlement Bruxelles I bis. La deuxième disposition interdit le contrôle de la compétence d’une juridiction d’un État membre par la juridiction d’un autre État membre.
La Cour répond par la négative également à la deuxième question relative à la possibilité de refuser la reconnaissance de la décision en se fondant sur l’article 45 du règlement Bruxelles I bis qui affirme d’une part la reconnaissance d’une décision peut être refusée si cette reconnaissance est manifestement contraire à l’ordre public de l’État membre requis (§ 1, lettre a) et d’autre part que le critère de l’ordre public ne peut être appliqué aux règles de compétence (§ 3). Sur ce point, la Cour ne considère pas la violation d’une clause d’élection de for comme une atteinte à un principe fondamental.
De même, la Cour considère qu’en l’espèce les conséquences sur le droit matériel applicables issue de l’application, ou pas, de la clause d’élection de for ne justifient non plus le refus des juridictions de l’État requis de reconnaître la décision étrangère sur le fondement de l’ordre public.
Au vu de ces éléments, il convient de faire vérifier scrupuleusement la question de la reconnaissance d’une décision dans le cadre d’un litige international pour éviter difficultés liées à un éventuel refus de reconnaissance.